Le roi soleil est revenu pour tout cramer sur ses provinces

Je vois une biche pour la première fois dans une prairie dans la forêt. Il bruine et je suis seule et je suis à vélo mouillée
On se regarde très longtemps puis elle repart et moi aussi. J'ai 7 ans et demi et j'avance pour la rattraper.
J'avance et sa patte pend au toit de la maison des vieux chasseurs.
Il y a plein de pâtes qui pendouillent ensemble, du sanglier, du lapin et de l'écureuil, on dirait un marché un grand marché dans la forêt sans gens et sans argent et sans bruit juste le vent qui fait bouger les pâtes devant mes doigts.
Il y a aussi des pâtes d'animaux bizarres que je ne saurai pas reconnaître ou que je n'arrive pas à voir.
Je ne sais pas.

J'avance et je vois les chasseurs qui chassent dans la forêt cachés derrière les arbres pour pouvoir voir les bêtes avec des arc et des flèches .
Je vois les animaux qui courent devant eux tellement vite que leurs pâtes n'arrivent pas à suivre et restent alors dans la forêt et que les chasseurs les prennent pour pendre les pâtes à leurs cous.

Je sais que les chasseurs tirent avec des flèches parce qu'un jour Olivier m'a prêté l'arc et les flèches d’Étienne, alors j'ai tiré dans le champ en face et il m'a dit fait attention parce que l'arc et les flèches sont des armes et peuvent tuer.
Ça ça m'a rendu triste j'ai dû retenir mes larmes un peu pour qu'il ne me voit pas pleurer et ne pense pas que je soit faible car je voulais encore tirer.

Je sais aussi qu'on peut lancer des pierres comme des flèches. Des pierres pointues comme des grandes dents. Ou même plein de petits cailloux, et parfois des plus gros. Quelqu'un m'a dit qu'on pouvait faire du feu avec des pierres mais je n'ai pas compris comment et je n'ai pas compris pourquoi.
Mais le feu aussi est une arme et je n'ai pas le droit d'en utiliser.

J'avance plus profond dans la forêt et il bruine mais je ne vois toujours pas la biche qui doit avoir trois pâtes et plein de flèches dans le dos un peu comme un grand hérisson qui boite seul dans le noir.
J'ai peur de la retrouver mais j'ai de la peine quand je pense à elle sans peur.

Et quand j'ai peur, je ferme les yeux et je pense aux histoires que ma mère me raconte pour ne pas avoir peur.

Sur le rituel symbolique de la Vassalité, d'après un article de Jacques LeGoff, où l'objet que le seigneur donne au vassal, souvent un outil, fait acte de contrat.
Après avoir joint les mains, après les avoir embrassées, l'objet reste.
Il peut être cassé pour rompre le contrat, mais cela ne se fait pas.

Abundia, Satia, Diane, Perdra
Mange à ma table et mangeons ensemble
Mes larmes s'écouleront au sol
Et nous ferons vivre sur les cendres
les blés
Abundia, Satia, Diane, Perdra
Les nuits et le secret des grands feux
M'ont été retirées. Alors vole
Dépose moi là où je ne peux
me rendre....

The Hanging Man

By the roots of my hair some god got hold of me.
I sizzled in his blue volts like a desert prophet.

The nights snapped out of sight like a lizard’s eyelid :
A world of bald white days in a shadeless socket.

A vulturous boredom pinned me in this tree.
If he were I, he would do what I did.

Sylvia Plath

Souvent ma mère m'appelle et pleure le monde où elle m'a amenée.
Elle me parle de rage et d'angoisse internes, elle me parle de son inertie à elle. Elle me parle en pleurant des pleurs de ses ancêtres qui eux aussi pleuraient leur inertie interne.

Elle me parle des dépressions et me parle de la famille, des tristesses familiales qui coulent jusqu'à aujourd'hui, jusqu'à elle, jusqu'à ma sœur et à moi, et que ma mère, elle, voit parfois et pleure parfois par peur de ça.

Ma mère me parle de sa grand mère qui résistait pendant la guerre,
Ma mère me parle de sa belle mère qui travaillait comme infirmière. Elle s'est fait battre, ta grand mère et à pleuré son enfant mort qui n'a pas voulu naître ici. Mais elle devait travailler, elle est donc repartie, en attendant la mort de l'homme qu'on disait sien. Il est encore dans le lit où mon père à moi dort.
Dans la famille de ta grand mère, m'a dit ma mère, on dit que les morts sont vivants. Qu'ils vivent un peu différemment et que certains peuvent même les voir. Ta grand mère en a vu avant. Ta famille parfois les appelait, les enfants n'avaient pas le droit de rester là le soir, avec les morts et les gens, pour voir voler les tables au centre du salon.
Ma mère m'a dit que ma famille a trop parlé aux morts, que le malheur est resté là quand les morts eux s'en sont allés et que pleurer les morts ne nous sert plus car nous les avons trop appelés.


Alors on n'en parle plus.

Amadou contenant
foyer chaud

Voici ma carte mentale, ma maison de l'esprit, où s'articulent mes textes, projets, images, recherches et références, en un espace psychique. Les liens sont des images qui s'influencent entre elles. 
Bonne visite.

Here is my mind mapping, or mind palace, where I can put my texts, projects, images, references and links together, in a psychic space.
Links are images influencing themselves. 
Enjoy your visit.


Maïa Hamilcaro-Berlin